Introduction par Jacky Arlettaz


Atelier philo de Université Populaire de Perpignan (UPP)


On a beau désirer parfois le refuge d’une île déserte et éloignée de toute civilisation, l’autre, pièce maîtresse de notre univers, reste une force d’attraction irrésistible.
De quoi est donc fait ce caractère indépassable du rapport à l’autre ?
1) Du sens des mots
Le substantif rapport suppose une relation (relation que deux grandeurs, deux quantités ont entre elles lorsqu’il s’agit du domaine scientifique: idée souvent de quantité), mais aussi action de rapprocher une chose d’une autre, lien établi par l’esprit entre des choses distinctes (dans d’autres domaines : idée souvent de qualité).
Autre désigne le deuxième élément d’un ensemble de deux éléments, sert à désigner un élément distinct d’un ensemble non limité à deux éléments, ou autre élément d’un autre type…
2) Nous concentrerons notre regard, dans un premier temps, sur l’autre « universel » et non celui dont la parentalité, ou la filialité, tisse des liens particuliers ; non l’autre de la « tribu », l’autre proche, que des grandes forces nous poussent à aimer.
3) La relation des personnes, au premier plan de nos préoccupations contemporaines, n’a guère été traité par les philosophes des siècles passés: ils n’avaient pas approfondi la notion de personne. Et lorsque la présence du sujet pensant (Cf Descartes) est découverte, ce n’est pas sous le signe du rapport à l’autre, mais sous celui de la solitude, ou de la séparation. C’est le moment du solipsisme (c’est à dire le moment où le sujet se croit seul au monde). Le sujet est ici la source de la vérité.
4) Peut-être l’Homme est-il poussé dès lors vers les autres par son incapacité à survivre seul. Les nécessités vitales exigent l’instauration de liens avec les autres. Mais ces relations ont-elles pour seule source le besoin ? La présence des autres n’est-elle qu’un mal nécessaire à sa propre conservation ? Pourtant l’Homme n’est pas autarcique. Alors son but est-il de vivre avec l’autre, de s’allier avec un associé ?
QUI SE RESSEMBLE , S’ASSEMBLE
Néanmoins, l’autre n’est pas seulement l’être avec lequel je suis contraint de coexister, mais aussi celui auquel je m’identifie et pour lequel j’éprouve de la sympathie (au sens premier du terme : faculté de souffrir avec, c’est à dire de s’identifier à l’être que l’on voit souffrir). Autrui est donc mon semblable et a les mêmes droits que moi.
Toutefois l’adage « qui se ressemble s’assemble », ne suffit pas à expliquer pourquoi mes liens avec autrui semblent nécessaires et indissolubles.
SANS ALTERITE, PAS D’IDENTITE
La relation à l’autre est donc plus qu’un mal nécessaire, elle est constitutive de notre identité. La notion de « semblable » ne doit pourtant pas exclure de différence entre autrui et moi-même. La relation à l’autre implique donc à la fois une proximité et une distance : il ne peut y avoir de liens qu’entre deux êtres à la fois distincts et analogues.
Avec Hegel, l’originalité de l’autre que moi est à la fois reconnue et interrogée, tandis que jusque-là, la présence des autres semblait aller de soi, ou du moins, ne soulevait pas d’autres difficultés que celle des objets.
Dans cette ambivalence réside ce qui nous rend la vie avec autrui absolument indispensable : comment, sans l’aide d’autrui, pourrais-je acquérir une idée de moi-même ?
Par comparaison et par rapprochement, j’apprends ce que je suis : un Homme. Inversement, pour savoir qui je suis, j’ai besoin de connaître ce qui me distingue des autres hommes.
L’IRREDUCTIBLE ALTERITE DE L’AUTRE HOMME
C’est parce qu’autrui est le même que moi, que ce qui m’apparaît vrai lui apparaît vrai à son tour. Je peux même comprendre ce qu’autrui ressent, en ce que je le ressens moi-même.
Pourtant la similitude d’autrui n’est qu’une supposition. Nous sommes deux, non pas comme deux fois le même, mais comme deux autres : autrui est si différent pour moi de moi, que nous ne pouvons pas nous connaître, même si nous pouvons nous reconnaître.
UNE CONTRAINTE POUR L’INDIVIDU
L’Homme, parce qu’il ne peut exister en dehors de la société, ne doit-il vivre que pour elle, que par elle ? ou au contraire la société n’est-elle que la condition nécessaire à l’existence de l’Humanité ?
Kant parle de « l’insociable sociabilité de l’Homme »…mais c’est pour en souligner aussitôt la fécondité. Cette contradiction (aporie) est, en effet, source de richesse pour l’humanité : n’est-ce pas la différence et même l’antagonisme des individus qui anime la société et lui assure sa vitalité ?
L’AUTRE EN MOI
L’Homme est un être de culture. Ce constat conduit à remettre en cause l’idée d’une nature humaine universelle. L’Homme étant un animal social ou, comme le disait Durkheim : « L’Homme n’est homme que parce qu’il vit en société » : ce qui signifie que la société est infiniment présente au sein de chaque individu. La notion de « personnalité de base » s’efforce de rendre compte de cette présence ; cette identité dynamique qui laisse advenir l’inconnu, l’inattendu, l’autre… n’engendre-t-elle pas un individu dispersé (paradoxe) porteur d’identités multiples ?, être composite à la logique métisse ?
Toutefois, si j’accueille l’autre en moi, je progresserai vers une identité plus forte vers le soi constitué de moi et d’un autre.
QUESTIONS A SE POSER
A quoi servent les autres ? à mesurer notre propre bonheur ? à évaluer nos talents ? à exercer notre sociabilité ? à souffrir avec nous ?
N’AIME-T-ON JAMAIS QUE SOI-MÊME ?
COMMENT ORGANISER MA COEXISTENCE AVEC L’AUTRE ?
DE LA CONNAISSANCE A LA RECONNAISSANCE D’AUTRUI

 

Compte-rendu de la séance par Andrée

 

L’autre : une question essentielle et complexe
1° idée : l’autre est celui auquel je m’identifie
2° idée : sans altérité, point d’identité
3° idée : l’irréductible altérité de l’autre
4°idée : l’autre en moi

Le travail au sein du premier atelier de réflexion.


L’autre constitue un besoin vital pour le petit homme. Dès la naissance si le bébé ne peut entrer en relation avec l’autre, sa mère, s’il n’est pas stimulé, appelé…en un mot reconnu…il peut aller jusqu’au refus de vivre.
Des enfants se laissent mourir dès les premiers jours de la vie par manque d’amour (expérience professionnelle observation).
Dans les orphelinats de Pologne, on a observé des enfants qui perdaient la verticalité par ce manque de communication essentiel ;
« L’hospitalisme » : ensemble des troubles psychiques et somatiques atteignant un jeune enfant ( moins de 15 mois en général/à la suite d’une hospitalisation prolongée qui le prive des relations avec sa mère » (Le petit Larousse)


F. DOLTO a souligné la nécessité de l’intérêt porté à la parole de l’enfant.
L’infant : 1/garçon ou fille
2/fils ou fille de
3/personne originaire de
4/ personne considérée comme rattachée à un être, une chose (petit Larousse)


L’enfant ne peut exister que dans la parole entendue.
La place de l’enfant dans la famille ?
Philippe Ariès a réfléchi à ces questions.
L’enfant, les enfants, étaient des bras pour satisfaire la nation…
La notion bascule avec le courant congrégationaliste…l’enfant a une certaine qualité.


_La question du chômage : non à l’autre mais au même- cela pose la question de l’éthique.
_Autres questions : quelle est notre liberté quand nous rencontrons l’autre ?
Les autres sont ils formatés par leur histoire ?
Deux êtres qui se rencontrent sont ils libres ?


_Peut on parler du rapport à l’autre sans parler de soi ?
« Ce je est un autre » Rimbaud
a force de rapport à l’autre, on découvre qui on est.


_Comment se construit on ? Comment se construit la personnalité ?
La relation à l’autre ?
_ L’idée de liberté : l’autre m’impose t’il quelque chose ?
L’autre m’aide à me construire.
_ C’est que je dois me connaître ( le regard sur moi)
Sartre : « l’enfer c’est les autres »
Cf. l’oracle de Delphes
Connais toi toi-même.
En avons-nous les moyens ?.. ; Quand on appartient à la société…
Dire non n’est pas aisé.
Dolto : « c’est le non qui construit »


_Rester rebelle pour être libre. (Belle et rebelle/belle à nouveau)
_Difficile de se connaître soi même.
- chercher en nous
- plus j’avance plus je suis multiple à l’infini
- connaître la part de soi même
- le regard de l’autre pèse beaucoup sur moi
- on est toujours dans cette société sous le regard de l’autre
- l’être c’est un devenir, a-t-on une finitude ?

_On n’en finit pas de se connaître
- c’est comme une respiration ; dans ses rythmes on évolue
- on a besoin des autres...et on est toujours seul.

_La liberté commence là ou finit celle de l’autre : faux
Jacquard : la liberté n’existe pas sans la liberté de l’autre
L’autre m’oblige dans la relation : si l’autre n’étaient pas là, je n’aurai aucune démarche à faire.
_L’autonomie : se donner une loi à soi même


_Freud : la horde sauvage
Deux topiques (psychanalyse- modèle théorique de représentation du dysfonctionnement psychique- petit Larousse) proposées :
Un mâle prédominant : le PERE
Une progéniture, des fils qui n’arrivaient pas à venir à bout du père, se sont mis d’accord et ont tué le père et l’ont mangé.
Le totem : animal ou plante considéré comme ancêtre mythique ou parent lointain, des individus appartenant à un groupe social donné-2 représentation particulière de cet animal , de cette plante, symbolique de ce groupe. Le petit Larousse.


Le totem.. ;la mémoire de père engendre le remord, la culpabilité…
D’où dorénavant, l’interdiction de l’inceste ; l’interdiction de tuer le père.
On a échangé un peu d’amour contre un peu de sécurité. Ceci est la base de notre société démocratique.
Rebelle….belle à nouveau
C’est une co-naissance. Je vis, je revis avec l’autre : reconnaissance

_La relation, est-ce ce lien à l’autre ?
L’autre me sert à moi. Ce côté intéressé dérange.


_La relation à l’autre : un contrat implicite.
La plupart du temps est il implicite ?
La plupart- du temps, il est implicite.


Sans le regard de l’autre, l’individu n’est pas lui-même…l’apparence de l’être.
Difficile de dire non, de ne pas se justifier.


_Le rapport à l’autre : des connivences et des différences... ; l’intérêt du lien.
Avoir une relation sans se renier.


Référence à l’éthique : le respect
_Nous vivons dans une société de spectacle, être soi même devient difficile.
On est dans l’apparence, on est appelé à être un autre et pas soi même.
_La connaissance et la reconnaissance d’autrui.
L’autre est différent.
_Se protéger de la société du paraître, du pare autrui.
On n’est jamais vraiment soi.


_Le contrat : ce que je mets dans le contrat. L’un et l’autre n’y mettent pas la même chose.
_Dans l’amitié, il n’y en a qu’un qui est ami de l’autre.
« Ce lien généralement réciproque » le petit Larousse.


_Un témoignage sur l’accompagnement en fin de vie : nous sommes trois autour de la personne, le corps médical, le parent et celui qui bénévolement accompagne.
Le 3ème élément, le nouveau lien crée avec ce qui lui est propre, unique.


_Beaucoup de personnes vivent sans rapport à l’autre.
…cela peut engendrer la folie.
L’autre peut être distant.
Le lien virtuel peut provoquer l’isolement…l’échange entre individus dans le virtuel, comment l’intègre t’on ?
Et l’amour ?


_Plaire à l’autre, pour plaire à l’autre, on peut perdre sa propre parole.


_La rencontre avec des gens qui pensent autrement la culture.
Dans notre culture, l’autre, le prochain, l’amour de l’autre, du prochain ? (cf . Séraphine reconnue comme un grand peintre après sa mort)
Le besoin d’écoute dans notre culture ?
Le manque de communication vraie ?


Avons-nous besoin de reconnaissance ?
Besoin de non connaissance de nous même ?


Les vases communicants : l’un remplit l’autre.
Freud : on porte en nous les pulsions de mort les plus primitives. C’est l’autre qui valorise, qui contrebalance.


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La parole libre circule au sein de l’atelier.
Le dernier quart d’heure de travail pour énoncer des idées pour la fois d’après mais aussi pour faire synthèse de l’atelier du jour. Ai-je bien compris ?


Ce rapport est une compétence et non une synthèse. J’espère avoir été le plus fidèle possible…sinon la parole est à vous.
Je me suis autorisée à retranscrire (après avoir feuilleté pour moi, le petit Larousse) la définition de certains mots.


Prochain thème : L’IDENTITE