ATELIER DE PHILOSOPHIE POUR ADULTES (2008-2009)
Cycle sur le rapport lÕautre
Sance 4 du 28-02-09 : LE RESPECT
16 participants
Introducteur et
animateur : Jacky
Prsidente de
sance : Claude
Secrtaire de
sance : Michel
1) Introduction par
Jacky
Le concept dÕUniversit Populaire ? Respectable !
La qualit des savoirs qui y circulent ? Respecte.
Les lecteurs ? Respectueux dÕeux-mmes en tant que lecteurs dans la
mesure o ils ne font pas dire aux textes nÕimporte quoi !
Et autrui ? Fait-il partie du
pacte Ē ne fais pas autrui, ce que tu ne voudrais pas quÕil te
fasse Č, contrat qui traduit la rciprocit de lÕintrt ?
DÕo vient ce mot Respect ?
Du fin fond du XIII” sicle, du latin Ē respectus Č
qui signifie gard, considrationÉ
On ne sait plus aujourdÕhui o donner du
respect : respect des droits de lÕhomme, respect des animaux, des arbres,
de la nature, de la TerreÉ qui ne le voudrait pas ? Tant pis si on en perd
en comprhension ce que lÕon gagne en extension !
De plus, le respect est souvent employ dans un
sens dtourn, voire affaibli : - il peut tre sentiment de dfrence du subordonn par rapport un suprieur, et
manifest par sa soumission
lÕautorit;
-Il peut-tre : traiter lÕhumanit dans ma
personne et en la personne dÕautrui comme une fin et
non comme un moyen ; agir par devoir, par simple respect de la loi
morale. Selon Kant, le respect, est le seul sentiment qui soit moral (nÕtant
pas produit par ma sensibilit particulire).
-Dans un sens plus largi, le mot dsigne une obligation
morale( et parfois lgale) de
protger un bien extrieur.( respect de la nature, par exemple).
La
premire dfinition opre un renversement complet par rapport la premire, et
la notion de respect nÕen est que plus ambigu.
Il remplit des fonctions videmment diffrentes
selon quÕil sÕagit de celui que doit prouver le domin pour son dominant ou de
celui que dit prouver ce dernier
pour son domin. Pour le premier, respecter
nÕest-ce pas se soumettre ? Pour le second, nÕest-il pas quelquefois prtexte masquer les rapports de
domination ?
Mais respecter ce que lÕon nous demande de
respecter, sans en discuter, nÕest ce pas la porte ouverte lÕirresponsabilit, lÕinhumanit ? ( tel Eichman qui obit aux
ordres de ses suprieurs, en invoquant son sens du devoir, son respect inconditionnel pour le Furher).
Ce respect-l nÕest-il pas condamnable ?
Pouvons-nous encore, nous rconcilier avec le respect qui a t dchu en raison
des crimes dont il sÕest trouv solidaire ? La valeur dÕun homme et le
respect profond ne tiennent-ils pas avant tout ses actes ?
La possibilit de respecter demeure lie celle de discriminer : le respect peut tre une vertu, mais seulement
si son objet est vraiment digne. Il existe une forme de respect, faite de
conformit sociale ou de soumission aux hirarchies qui relve purement du
dressage.
De mme, la raison est source premire de respect chez lÕhomme ;
du fait que tous les hommes possdent la raison, ou du moins la capacit de
raisonner (Descartes), ils sont dignes de respect.
Au contraire ne peut-on parler, de respect comme
prise de conscience qui me fait reconnatre lÕhumanit dans la personne dÕautrui comme en
moi-mme (le visage de lÕautre qui mÕoblige (Lvinas). Ce respect-l est
retenue, suspension de lÕacte insolent. Il pose silencieusement par un accord tacite, une limite ne pas franchir.
RIEN
DÕHUMAIN NE MÕEST ETRANGER (CAMUS)É
et comme le dit Sandrine Bonnaire dans Ē Sans
toit ni loi Č, Ē ce nÕest pas les autres qui vous le donnent le
respect , cÕest vous qui le fabriquez Č : le respect conduit donc exprimenter
lÕaltrit quÕil contient. Mais nÕest Homme que celui que les autres Hommes
considrent comme tel.
La
socit rend-elle pour autant
Homme ? Que les nazis aient vu dans les tsiganes des tres
infrieurs, que les colons portugais aient considr les Amrindiens comme des
animaux, suffit-il ce que ceux-ci soient des tres infrieurs pour les uns et
des animaux pour les autres ?
Peut-on respecter une loi pour la simple raison
quÕil sÕagit dÕune loi ?
Pourquoi le devrait-on ? Certains nÕencouragent-ils pas la
dsobissance civique ? Ne fait-on pas dans certaines occasions, lÕloge
de lÕirrespect, celui qui nous
apprend la distanceÉce que lÕexpression Š tenir en respect - dit
loquemment. Ē JÕaime la peur quÕa lÕhumanit
dÕelle-mme Č disait Bataille, en nous invitant
une permanente obligation dÕirrespect. Si dmocratie oblige, lÕidal du bon
lve, de lÕlve srieux est-il vraiment dsirable ? La rvrence, la
soumission, la dpendance vis vis de ses matres, en un mot, sa minorisation
ne sont-elles pas problmatiques ? Penser : nÕest-ce pas dire
non ? lÕirrespect, nÕest-il pas le prix payer pour que survive en
lÕadulte, la jeunesse ?
Le respect ne sied-il pas quÕaux rsigns et aux
dsabuss ?
BIENVEILLANCE OU RESPECT OU ÉESTIME ?
Peut-on parler, dans le sentiment constitutif du devoir autrui, de respect ou de bienveillance ? et si
quelquÕun tmoigne de trop
dÕardeur dans lÕamour, ne perd-elle pas quelque chose du respect de
lÕautre ? On peut regarder
lÕamour comme la force dÕattraction , et le respect comme celle de rpulsion,
de telle sorte que le premier sentiment commande que lÕon se rapproche, tandis
que le second exige que lÕon se maintienne lÕun de lÕautre une distance convenable. Ce quÕil y a de distant, ne
contribue-t-il pas sa force ainsi quÕ sa vertu.( une distance respectueuse).
Mais
alors, le respect ne serait-il pas un peu dficient ? Que lui
manque-t-il ? La passion peut-tre ? le courage ? LÕamour ?
Dans certains cas, le respect se rapproche de lÕestimeÉmais qui se
contente dÕestime ?
Dans toute relation galitaire et amicale, la
notion de respect semble tout fait dplace : car je nÕai aucune
distance entretenir, et nÕai rien non plus masquer.
De la crainte au respect, la distance nÕest pas si
grande.
Ainsi respecter ses parents, signifie
essentiellement : Ē les craindre Č et dans la pratique,
agir de faon nÕavoir pas les craindre. Mais cÕest aussi ne pas dmasquer
lÕimposture de leur Ē autorit Č, ne pas la remettre en question.
CE QUI DOIT ęTRE RESPECTE ?
LÕtre humain selon Pic de la Mirandole (XV”sicle)
nÕest ni nature, ni un pur esprit, mais un mouvement par lequel il se
ralise : la dignit de lÕhomme tient sa libert. Cette dignit lui
donne une valeur qui mrite le respect. CÕest uniquement parce que lÕhomme est
Homme quÕil est respectable (Kant).
CH.Baudelaire est plus restrictif Ē Il
nÕy a que trois tres respectables : le prtre, le guerrier et le pote.
Savoir, tuer et crer. Č
Le sentiment de respect rend nigmatique la position
absolue dÕautrui (comme la fois autre et semblable). LÕgalit des personnes
veut-elle dire que toutes les diffrences culturelle , religieuse, ethnique,
soient pour autant respectables ?
On ne respecte vraiment chez autrui, que ce que
devant quoi lÕon sÕincline soi-mme. Tout le reste nÕest quÕindiffrence polie.
Faut-il enfin distinguer le respect priori et le
respect vritable ;
sauf sÕils se comportent pire que des animaux, les
hommes, ont la potentialit dÕexercer leur raison et ce titre mritent
priori le respect .Mais le vritable respect correspond plutt une
reconnaissance des actes de chacun. Ce respect ne se dfinit pas pour tous,
mais se considre au cas par cas en fonction des ralisations de chacunÉet
aussi comme le prcisait Balzac Ē on respecte un homme qui se respecte
lui-mme. Č
2) Synthse des compte rendus du dbat
par Michel
Le
respect revt un aspect social trs fort : cela peut tre une soumission
lie un concept de valeur (admiration, adhsion une faon de faire), mais
aussi revtir un aspect stimulant non passif.
Il peut exister aussi une obligation de dsobissance.
Le refus de lÕordre tabli, les rgles, (matres,
parents) est-il possible ? Peut-on dire non en fonction de la morale et de
la raison ?
Il faut toujours distinguer le respect subi et le
respect choisi.
Respecter des rgles est diffrent de respecter des
personnes.
Que se passe-t-il si on ne respecte pas une personne
qui incarne une rgle ?
Comment se passer de Ē lÕinsociable sociabilit Č
de lÕhomme qui est la fois attir et repouss par lÕautre ?
La loi est le lien, la garantie juridique entre deux
personnes et dtermine la responsabilit de chacun. Mais la loi nÕest plus
Ē inoxydable Č et elle laisse la place diffrentes interprtations.
Pour Benjamin CONSTANT, cÕest la loi qui est
prioritaire, mais on doit obir aprs vrification des valeurs.
Il faut toujours obir dÕaprs DESCARTES , en
usant du Ē filtre de la raison Č et agir avec discrimination,
dignit.
Respecter et obir ne sont-ils pas des termes
contradictoires ?
Si le mot respect a t cr, sÕil existe, ne
cache-t-il pas un pige en lui-mme ?
Le mot respect fait partie des mots dont le sens est
plus fort lorsquÕil est exprim au singulier quÕau pluriel.
Dans le respect, on met toujours en valeur la
prminence des actes.
Jean-Paul SARTRE
a voqu maintes reprises, le thme du respect, il met en exergue
notamment dans Ē la PÉ. Respectueuse Č, la corrlation entre
lÕobissance et le respect ; dans Ē Les Mains Sales Č, la grande
question cÕest aussi le respect des hommes.
La notion de respect est troitement lie la notion
de justice.
Si des individus nÕont pas toute leur raison ,
doivent-ils tre tout de mme respects ?
Toutes les cultures se valent-elles ? Il convient
dÕobserver leur position par rapport la peine de mort, la place quÕelles
accordent au respect de la femme.
Au sujet de la peine de mort, il convient avant tout
de juger lÕacte et non lÕhomme afin de laisser celui-ci sa dignit, son
humanit.
Il existe une drive du respect, cÕest le mensonge que
lÕon peut tre amen profrer pour protger quelquÕun, pour ne pas le faire
souffrir.
Le mensonge ne peut pas tre une marque de respect, il
peut prendre lÕaspect dÕune manipulation.
Ce qui est essentiel cÕest Ē la direction
dÕintention Č, ce qui prside lÕaction (cf la fable de lÕOurs et
lÕAmateur des Jardins, de Jean de La FONTAINE)
Il
existe un lien troit entre politesse et respect.
Actuellement, la politesse est mineure par rapport au
respect. Il y a un sicle, cÕtait lÕinverse. A ce niveau le respect peut-il tre assimil la politesse ou
la civilit ?
La politesse se rsume actuellement un code de la
relation.
On est poli force dÕtre frott aux usages. Ne
pourrait-on pas remplacer lÕancienne formule : Ē trop poli pour tre
honnte Č par la formule : Ē trop honnte pour tre
poli Č ?
Le respect se rapproche de lÕintrt port lÕautre.
On retrouve en lÕautre souvent ce que lÕon est en soi, le respect consiste
souvent se retourner pour mieux regarder.
En quoi dans notre socit, on a le sentiment
que lÕon manque de plus en plus de respect ?
Plusieurs types de rponses sont possibles ce
questionnement :
-
lÕindividualisme est
actuellement prdominant ;
-
dans notre socit
capitaliste, ce qui est respectable, cÕest avant tout lÕArgent, les Biens, et
le Matriel ;
-
Les modles vhiculs
par nos dirigeants, par notre prsident, ne forcent pas le respect ;
-
LÕexercice de
citoyennet, nÕest plus dÕactualit, les lus ne montrent plus lÕexemple, on se
fait reprsenter par des gens qui ne sont plus respectables ;
-
On assiste une
banalisation des faits de socit, lÕmergence dÕun concept
dÕarrogance ;
-
De plus en plus, on peut
observer galement une dlgation et une dilution de la responsabilit ;
-
A la ville,
contrairement la campagne, on ctoie les autres sans les connatre ;
-
Les biens collectifs
(par exemple la FAC) se dgradent de plus en plus, ce phnomne nÕest-il pas
li au non respect du savoir ?
-
Il faut diffrencier les
manques de respect au niveau individuel de ceux qui concernent le niveau
collectif ;
-
On fait de plus en plus lÕloge du
jeunisme, pour innover, il faut tre jeune, il nÕy a pas de vritable,
dÕauthentique transmission du savoir et du savoir-faire ;
-
On fait de plus en plus
lÕloge de la des-appartenance ; les liens entre les membres dÕune socit
sont multiples, moins forts, moins solides et moins pourvus de qualits.
Texte de Dorothe :
Le respect de lÕautre dans sa diffrence, ne veut pas
dire adhsion ou fusion, lÕon peut et lÕon se doit dÕtre dans lÕouverture,
sans projection mais dans la comprhension de ce qui EST : lÕautre et moi,
diffrents et similaires la fois. Ce respect dans lÕouverture demande une
rflexion permanente, un rajustement dans nos rencontres et relations diverses
trs signifiantes pour notre propre volution et rapport aux autres. Et, selon
la phrase dÕAlbert CAMUS Ē rien dÕhumain ne mÕest tranger Č nous
pouvons dire de la mme faon Ē tout ce qui est humain est ntre Č.
Dans la discrimination se posait cette question :
Ē quel est cet autre si diffrent ? Č nÕavons-nous pas au fond
de nous ces quelques diffrences qui nous dplaisent rsoudre ?
Peut-tre moins prononc, mais tout de mme ?
Donc pas de jugement intempestif mais investigation
trs honnte de ce que lÕon est vraiment ?
Le prochain atelier aura lieu le samedi 21 MARS,
sur un thme choisi par la majorit des participants : Ē la VALEUR Č.